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Wolfgang Rittman : l'avenir du billard

14/07/2014

Publié par jérémie picart

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© © Billard Magazin Touch
Wolfgang Rittman : "Un recul temporaire ne doit pas conduire à la ruine de notre sport."

Le calendrier international est en train de prendre forme, celui de Kozoom est surchargé et les fans de billard peuvent s’attendre à une nouvelle saison prometteuse avec de nombreux tournois et championnats à travers le monde. Le point d’orgue se déroulera en Corée du Sud à l’occasion du championnat du monde individuel. Brandenburg et ses championnats d’Europe regroupés seront également à l’affiche cette année.

Malgré cela, il est difficile de ne pas admettre que le sport billard souffre de moments difficiles. Qu’attendre des années à venir ? Cette question a été posée à Wolfgang Rittman, Président de la Confédération Européenne de Billard (CEB).

Cet Allemand parle clairement et sans détour de notre sport, il a une vision lucide et une analyse claire des choses. Il nous livre un aperçu et une perspective réaliste de l’avenir à commencer par un préambule des prochains championnats d’Europe.

 

Kozoom/Markus Schönhoff : Pouvons-nous supposer que la deuxième édition des championnats d’Europe regroupés se tienne à Brandenburg une nouvelle fois ?

Wolfgang Rittman : "Oui, l’accent sera mis sur Brandenburg et ces championnats d’Europe regroupés durant dix jours en avril et en mai 2015. Et permettez-moi aussi de promouvoir un autre événement important dans la ville : le Bundesgartenshow qui ouvrira ses portes au même moment et qui offre une large variété de sports intéressante."

 

Kozoom/MS : Quelles ont été les réactions à propos de Brandenburg 2013 plus particulièrement des joueurs, des fédérations et des sponsors ?

WR : "Les retours ont été positifs. Cependant, l’expérience nous montre que certains points restent à améliorer lors de la prochaine édition. Cela devrait se faire en étroite collaboration avec le maire de la ville, Mr Tiemann, et la personne responsable de l’organisation au sein de la ville."

 

Kozoom/MS : La programmation évoluera-t-elle ? Ou les dotations ? Quand débutera la période d’inscription ?

WR : "Suite au développement de la discipline 5 Quilles, le nombre de participants progressera de façon significative. Sinon, pas de changements importants. L’inscription sera ouverte à la fin de l’année longtemps avant la clôture."

 

Kozoom/MS : La CEB est l’une des confédérations de l’UMB. Les fédérations nationales sont traditionnellement très fortes et sont la base du développement sportif. Une demande, au sein des fédérations, voudrait que la CEB s’investisse dans le marketing, l’organisation, le sponsoring et les relations publiques.

WR : "A ma connaissance, les fédérations se portent bien mais dans une minorité de pays seulement. Elles ne sont que quatre sur un total de plus de trente nations. C’est peu. Néanmoins, la performance des autres nations ne doit pas être sous-estimée. Je pense à la Turquie et à la Grèce."

"On peut toujours faire plus que ce que l’on fait actuellement mais à tous les niveaux de la structure sportive qui commence avec la culture de club. A tous les échelons, il faut des gens qualifiés et des capitaux pour le financement. Comme nous le savons tous, nous comptons sur les bénévoles et pas seulement pour notre sport mais aussi pour tous les autres moins en vue ainsi que les sports professionnels. Tous, le football en tête, sont en recherche d’attention médiatique et la bagarre pour dénicher du sponsoring fait rage. Le sport billard, comme la plupart des petits sports, ne joue pas un rôle majeur. On manque cruellement de capitaux. Cela devrait provenir de nos propres membres mais ça n’est pas concevable, ce n’est même pas une garantie de succès. Les développements nécessaires à la mise en œuvre de nouvelles stratégies sont bien trop onéreux."

"Le marketing démarre dans les clubs suivi par la région et la fédération nationale. Mais regardez autour de vous… qui connaît le club de billard dans sa rue ? Qui connaît les meilleurs joueurs, les championnats dans lesquels nous évoluons ? Il y a une telle différence avec les sports les plus médiatisés. Par exemple, si Martin Horn devenait vice-champion du monde, vous ne trouveriez pas le moindre article à ce sujet dans la presse de sa région natale."

 

Kozoom/MS : Quel regard portez-vous sur le développement du billard au sein de la CEB ?

WR : "Le sport billard est plus ou moins à la baisse dans les pays européens. Donc, en conséquence, il l’est aussi à la CEB car, non seulement les clubs disparaissent avec le temps, mais il y a aussi une faiblesse structurelle propre à bon nombre de pays. La CEB n’a pas d’effet là-dessus, nous devons juste rester là à regarder attentivement. En réalité, ce symptôme n’est pas exclusif au carambole. Moins de 10% des jeunes dans le billard ont moins de 21 ans. La moyenne d’âge des autres membres est très élevée. Sans changement majeur, l’extinction est malheureusement inexorable. La participation de cinq pays seulement aux championnats d’Europe de jeunes en est la parfaite illustration."

 

Kozoom/MS : Y a-t-il un ordre du jour pour les deux à cinq prochaines années avec des objectifs spécifiques pour la CEB ?

WR : "Se donner des objectifs n’est pas difficile mais les réaliser est presque impossible pour la CEB. Les fédérations sont autonomes et la CEB n’a pas d’influence dans leur cadre. C’est au niveau national que se situe l’ADN de la survie de notre sport. Le langage et les comportements varient selon les pays et seules ces initiatives nationales peuvent être couronnées de succès."

 

Kozoom/MS : Que pensez-vous d’une campagne de marketing ciblée qui vise à recruter de nouveaux sponsors. Ces considérations existent-elles ?

WR : "Ce serait l’idéal, bien sûr, de trouver des sponsors hors de l’industrie du billard. Cela requiert une auto-expression positive, ouverte et publique de notre sport. Les programmes télévisés, même au niveau national, se font rares. Ne parlons pas du nombre de spectateurs ou de ce que nous pouvons offrir à ces éventuels sponsors. Qui connait les stars actuelles du 3 Bandes en dehors du monde du billard ? Comment pouvons-nous séduire les sponsors sur ce marché ? Regardez la Coupe du monde de Football à la télé. Quand je regarde l’Allemagne : quand elle joue, l’audience voit des publicités sur les sociétés allemandes en langue germanique. Cela démontre que la publicité est, avant tout, un marché national. Le Foot sur les chaînes nationales attire automatiquement l’intérêt pour les manifestations internationales. Ainsi les sponsors observent une continuité de leur promotion qui peut s’avérer utile et efficace."

 

Kozoom/MS : Le sport billard est le cœur de l’activité de la CEB. Nous pouvons supposer que la CEB suit le développement des autres sports, ceux qui ont su conquérir l’espace audiovisuel. Souvent, les fléchettes sont données en exemple.

WR : "Le billard n’est pas le cœur de l’activité de la CEB. Elle est la fédération européenne des fédérations nationales dans le domaine billard carambole de l’Europe. Ce n’est pas une société axée sur le plan économique mais une association sans but lucratif. Le triomphe des fléchettes ? Je ne suis pas en mesure de juger ou de confirmer. Cette tendance se vérifie probablement dans certains pays. Pour ce qui est de l’Allemagne, ce n’est pas le cas."

 

Kozoom/MS : Des changements sont-ils opérés dans les tournois afin d’attirer l’attention des médias éventuellement en coopération avec l’UMB ?

WR : "Il y a des études, bien sûr, sur les attentes du public, c’est nécessaire pour maintenir le sport billard. L’homogénéité des règlements est primordiale indépendamment des langages et des lieux où ils se pratiquent. Ce que le public ne comprend pas est forcément ennuyeux. Cela doit être le plus succinct possible. J’insiste sur le fait que l’ennui qui est notre pire ennemi. Le sport trouve sa légitimité dans la satisfaction des joueurs, des officiels et des fans mais ce n’est pas ce qui stimule le public."

 

Kozoom/MS : Le marketing vous est très familier et vous connaissez le monde du billard depuis plusieurs années. Par conséquent, une question personnelle pour vous : Imaginez que quelqu’un veuille vous attirer en tant que sponsor pour un tournoi. Qu’attendez-vous de l’organisation ?

WR : "Je m’attends à ce que je dois faire dans n’importe quel autre événement sportif de haut niveau. Ce serait principalement :

- Le sport et son organisation doivent être attrayants pour le public et l’événement sportif doit correspondre à l’image de ma société.

- Rencontres avec les visiteurs de la manifestation, avec les internautes et les téléspectateurs.

- Plusieurs programmes télévisés aux heures de forte audience et bandeaux publicitaires à l’image de ma société.

- Accès professionnel pour mes invités.

- L’image de ma société et mes produits dans la couverture éditoriale et en conférence de presse."

 

Kozoom/MS : Quelle est votre vision du billard dans dix ans ?

WR : "Malheureusement, cela ne ressemblera pas à ce que nous connaissons aujourd’hui. Je connais le monde audiovisuel depuis plus de 25 ans maintenant tout comme l’état de développement du sport en général. Je suis bien conscient du chemin que nous empruntons. Comme beaucoup d’autres sports, le billard ne joue malheureusement pas un rôle majeur. Je me souviens de l’époque où nous bénéficiions d’une centaine d’heures de retransmission dix ans plus tôt en Bundesliga. Aujourd’hui, c’est le néant, les chiffres parlent d’eux-mêmes. Le vieil adage « garder des contacts est plus facile que d’en créer de nouveaux » s’applique toujours. Cela montre à quel point il sera difficile de renverser la vapeur."

"Bien sûr, le sport billard ne disparaîtra jamais totalement du paysage. Nous devons nous battre ensemble, depuis la base, pour stabiliser et maintenir le niveau actuel. Il existe des exemples de renaissance dans d’autres sports comme en Asie. Pendant des décennies, nous étions focalisés sur le Japon. Aujourd’hui, on assiste à l’explosion du développement au Vietnam, en Corée du sud et en Chine. Et ça ne fait que commencer."

"Un recul temporaire ne doit nous conduire à la ruine de notre sport. Nous devons puiser la force suffisante pour innover et trouver de nouvelles impulsions. Nous n’avons pas les moyens de mettre la barre trop haut mais la déception n’est pas bonne conseillère de réussite."

"La couverture médiatique de Kozoom est un bon début pour nous faire connaitre. Nous devons persévérer dans cette voie. L’avenir n’est, certes, pas rose mais en combinant toutes nos forces, de différentes façons, il y a certainement un avenir pour notre sport."

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