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L'adversaire qu'ils ne pourront jamais battre

27/11/2015

Publié par jérémie picart

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© © Kozoom

Considérez-vous les meilleurs joueurs mondiaux du Bandes comme des superstars ? Moi oui. Ils ne gagnent certes pas des millions, je le sais bien. Mais parfois, Lionel Messi fait un geste que lui seul a imaginé et il l’exécute sur l’instant.

Tout comme Caudron.

Des millions de femmes peuvent chanter. Mais seule Adèle chante comme Adèle. Et seul Horn joue du Horn, Merckx du Merckx, Tasdemir du Tasdemir. Ils font beaucoup moins d’erreurs que nous, mais plus important, ils y ajoutent leur style, ils enrichissent le jeu par leurs particularités.

Donnez-nous une vidéo de deux grosses séries, une de Zanetti et une de Jaspers sans nous divulguer le nom des exécutants. Juste les billes en mouvement. Je pense que nous pourrions identifier le joueur en question au bout de cinq reprises seulement.

Après trois journées passées à regarder le Lausanne Billard Masters en Live sur place (sacré privilège), mon admiration pour l’élite de notre sport ne s’est pas amoindrie. Au contraire, j’étais assis et j’ai admiré le spectacle. Mais j’ai pensé à maintes reprises : "Ce ne sont que des hommes."

J’ai observé un joueur de classe mondiale étudier une position sous tous les angles. Il avait d’abord fait nettoyer les billes. Puis vint le limage, six ou sept mouvements. Finalement, il touchera sa bille qui bougera de deux millimètres. Et vous ne le croirez pas, il recommencera quatre reprises plus tard !

Une autre star a lutté avec les coups grande/petite/grande. Le contre était difficile à éviter. Il y avait deux ou trois autres options possibles mais elles n’avaient pas sa préférence : trop difficiles. Il revint donc vers la ligne initiale, semble s’en détacher puis y revient à nouveau. Je peux lire sur ses lèvres le mot "kiss" soit "contre" qu’il se dit à lui-même. Le temps lui manque. Il a joué le coup et s’est dirigé vers sa chaise avant que la deux ne vienne dévier la trajectoire de sa bille hors de sa ligne.

J’ai vu un ancien Champion du monde jouer un coup classique relativement simple en bande avant et faire une fausse queue. Quel son terrible ! C’est pire que des ongles sur un tableau noir. Le coup fut pourtant réussi en 5 bandes au lieu de 3. Il s’est excusé puis a enchainé avec 8 points.

Un joueur connu pour ses prises de décision rapides et éclairées se dirige vers les toilettes à la pause de son match. Il venait de réaliser une série de 9 et portait sa moyenne à 2.000 mais son esprit était focalisé sur ce dixième point raté. Il passe près de ma chaise, attire mon attention et me dit : "Bert, je suis un idiot."

Aucun de ces joueurs n’est immunisé contre le virus du 3 Bandes ou la bactérie du billard. Ils sont parfois souffrants. L’adversaire qu’ils ne pourront jamais battre est le JEU lui-même. Ils sont armés jusqu’aux dents avec toutes leurs connaissances, leur mécanique et leurs capacités à résoudre les problèmes. Et pourtant, le jeu peut les laisser sans défense. Quand la réussite les fuit ou que leurs adversaires sont chanceux, ils peuvent être terrassés toutes superstars qu’ils sont.

Zanetti, double vainqueur du Lausanne Billard Masters, fait un peu plus de moyenne que l’an dernier. En 2014, il gagne à 1,400, cette fois il fait 1,700 et termine quatrième de son groupe. Un excellent match contre Jaspers est arrivé trop tard.

Bury n’était pas loin d’une place en demi-finale. Il a battu Blomdahl encore une fois et devait battre ensuite Sung-Won Choï lors de son dernier match de groupe. Ca ne s’est pas produit, le Coréen a dominé le match.

Merckx, bien en place quand il menait 32 à 22 contre Blomdahl dans le dernier match de groupe. Trois reprises plus tard, le Belge s’inclinait 32 à 40 sans avoir fait quoi que ce soit de mal. Il a juste été malchanceux. On peut néanmoins dire que son niveau de jeu n’a pas été exceptionnel avec 1,400. Merckx me semble un peu trop défensif ces derniers temps.

Tasdemir, le Fred Astaire du 3 Bandes a bien joué et a beaucoup souri surtout parce qu’il aime sa vie. Il perd contre Jaspers et se devait de gagner Horn. Il menait 35 à 31 mais Horn a sorti la série de 9. Dur ! Mais je le vois quand même parmi les 6 favoris pour Bordeaux.

Blomdahl n’a jamais été vraiment convaincant. Brillant par moments mais inconsistant à d’autres comparé à son niveau habituel. Il fait un superbe retour contre Merckx avec pas mal de chance mais en demi-finale, Horn était meilleur.

Sung-Won Choï a fait ce qu’il sait bien faire : marquer les points importants. Il perd contre Blomdahl mais bat Merckx et Bury. Il a bien joué contre Jaspers avec 29 points en 15 reprises après un départ catastrophique. Je ne le vois pas conserver son titre à Bordeaux.

Horn finit encore deuxième et comme l’an dernier, il a dû se battre pour en arriver là. Il admet avoir un léger désavantage à jouer sur des tables glissantes puisqu’il ne joue plus qu’en championnat d’Allemagne ces derniers temps. Défaite face à Jaspers en finale et en phase de groupe mais victoire contre Zanetti, Tasdemir et Blomdahl. Peu de joueurs peuvent rivaliser avec la précision et le calme de Horn.

Et Jaspers dans tout ça ? Même sa défaite contre Zanetti n’enlève rien à sa victoire finale. Il était, sans le moindre doute, le meilleur à Lausanne. Comme d’habitude, il a la meilleure générale. Mais plus important, il avait les épaules, le crâne le plus dur et le profond désir de gagner. Sans évoquer sa discipline sur le plan physique : n’y a-t-il jamais eu de joueurs envoyant aussi droit et avec autant de contrôle ?

                                          

Voici l'un des points chanceux réussi par Blomdahl contre Merckx pendant sa remontée. Le Suédois expliquera plus tard que c'est une double chance mais qu'il ne l'a pas joué dans cet esprit : "Je pensais le faire en 3 Bandes."  Pour réussir le point en 5 Bandes, il faut de la vitesse et beaucoup d'effet, encore un peu d'effet sur la quatrième bande et plus rien sur la cinquième.

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