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Le Classic Race, avenir des jeux de séries ?

01/04/2021

Publié par jérémie picart

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© Photos © Hervé Lacombe
Les Masters Chevillotte bleus à l'inauguration de la Classic Race

L’innovant Classic Race joué le week-end dernier à Andernos au Cadre 47/2 a enthousiasmé une majorité d’observateurs ainsi que la totalité des 8 joueurs présents. Même les joueurs « lents » ont convenu qu’il leur faudrait s’adapter à ce nouveau format de jeu révolutionnaire. D’un autre côté, plusieurs ajustements ou modifications ont été suggérés pendant ou après visionnage.

 

Rappelons que traditionnellement, les matchs au 47/2 opposent sur une distance précise (généralement 250 ou 300 points) deux joueurs sur une même table avec un joueur en action et l’autre à sa chaise, la durée du match pouvant varier de 45 mn à parfois près de 3h. Le Classic Race oppose les joueurs simultanément, chacun sur leur propre table (le choix du billard était donné au vainqueur du tirage à la bande). Les seules périodes d’inactivité ou de « chaise » sont les penaltys de 90 secondes, pauses imposées en cas de point raté en plus de la remise sur mouches. Le format traditionnel impose d’atteindre un nombre de points définis avant son adversaire et c’est donc la moyenne particulière qui prime (système bien sûr toujours en vigueur). L’objectif est désormais de réaliser plus de points que son adversaire sur une heure de jeu, la moyenne n’est donc plus le critère unique définissant la performance puisque le temps nécessaire à la réalisation des points entre en ligne de compte.

 

                  

 

                                                                     1er Willy Gérimont

 

Les points de règlement ayant suscité la controverse sont : la différence entre les deux billards jugés plus ou moins faciles (Point n°1), les périodes de penaltys communes où plus personne ne joue (Point n°2), le fait de repartir systématiquement sur la position de départ c’est-à-dire le point d’entrée (Point n°3), l’interaction entre les joueurs (Point n°4). J’en oublie certainement…

 

                  

 

                                                                       2ème Johann Petit

 

Point n°1 : Concernant la différence entre les deux billards, il faut bien entendu veiller à la minimiser le plus possible. Lors de cette 1ère Classic Race, le billard 1, celui de la bille blanche a été drapé de bleu en novembre 2020 et a très peu joué depuis. Il est resté entreposé la plupart du temps mais on sait bien que la tension des bandes, même sans jouer, se réduit avec le temps. Le second billard, celui à droite de vos écrans, avec la bille jaune, a été livré flambant neuf en février dernier. Utilisé d’abord pour les deux premières poules de la Kozoom 3C Challenge Cup avec un drap Simonis 300 Shark gris, il a été drapé du même Simonis Bleu Prestige que le billard voisin, 4 jours seulement avant l’épreuve. Ceci peut expliquer la différence - somme toute minime - entre les deux tables.

 

Gageons qu’à l’avenir, pour ces compétitions de très haut niveau, faire appel à un même technicien pour installer le même jour les deux draps avec une tension similaire, ne serait pas une précaution négligeable.

 

Mais il ne faut pas se leurrer, atteindre des conditions de jeu rigoureusement identiques entre deux billards est de l’ordre du fantasme, dans le studio Kozoom comme partout ailleurs. Il faut donc acter que l’importance du tirage à la bande pour décider de l’attribution du billard, de sa bille mais aussi de son arbitre, sera majeure en début de match. On peut aussi craindre que des différences de planéité entre deux billards posent des problèmes d’équité. Ce n’était bien sûr pas le cas avec les deux billards Europa Masters Chevillotte installés dans le studio mais ce sera inévitable si cette forme de compétition se démocratise. Vous l’avez tous constaté : la plupart des séries sont réalisées dans le tiers opposé à la rouge sur le point d’entrée. Dans ce cas, donner la possibilité de jouer le point d’entrée dans un sens comme dans l’autre, donc au choix du joueur, offrirait une alternative intéressante. A lui de demander à l’arbitre de placer la rouge sur le spot de son choix, tout comme il peut déjà choisir de quel côté de la bille n°3 sa bille doit être placée…

 

Ci-dessous quelques statistiques :

 

Billard bille blanche :

- 13 matchs : 2782 points, moyenne 214 points par match

- 107 points d’entrée réussis sur 160 soit 67% de succès

- Joueurs, Nb matchs (réussite point d’entrée) : Petit 3 (76%), Djoubri 3 (75%), Edelin 1 (73%), Declunder 2 (63%), Dessaint 2 (65%), Niessen 1 (67%), Gérimont 1 (90%)

- Meilleure marque Brahim Djoubri 322 points

- 1 match sur 13 au-dessus de 270 points

 

Billard bille jaune :

- 13 matchs : 3366 points, moyenne 259 points par match

- 75 points d’entrée réussis sur 100 joués soit 75% de réussite

- Joueurs/Nb matchs (réussite point d’entrée) : Gérimont 3 (69%), Faus 3 (58%), Niessen 3 (79%), Petit 2 (81%), Dessaint 1 (78%) Edelin 1 (100%)

- Meilleure marque Willy Gérimont 329 points

- 5 matchs sur 13 au-dessus de 270 points

 

L’avis des joueurs sur la difficulté du point d’entrée étant très différent, il est parfois difficile de faire la part des choses entre la difficulté technique (matériel exigeant) et la difficulté psychologique (pression exercée par les pénalités). 

 

Une modification possible : jouer 5 minutes d'échauffement, faire le tirage à la bande puis à nouveau 10 minutes d'échauffement sur sa table désignée. Ceci afin de jouer le tirage à la bande en toute connaissance du roulement. S'échauffer sur une table puis faire le tirage à la bande n'aurait pas de sens au risque d'en changer... Autre possibilité, 10 mn d'échauffement sur chaque table puis le tirage à la bande.

 

L’analyse révèle peu de désavantage dû au matériel comme l’a d’ailleurs rapporté Louis Edelin dans son compte-rendu FFB. La plupart du temps, les joueurs gagnant le tirage à la bande ont conservé leur table d’origine à l’exception de Niessen et Dessaint qui ont préféré changer de table. Rétrospectivement au vu des statistiques, c’était un bon choix pour le Français mais pas pour le Belge.

 

Quant à l’idée de faire une pause au bout de 30 minutes pour changer de billard et établir une forme d'équité, je suis pour le moins sceptique ! Le tirage à la bande a toujours été une petite épreuve en soi et bien avisé celui qui le remporte afin de choisir lui-même ses armes ! Reporter la position du billard 1 sur le billard 2 et inversement n’est pas facilement transposable à ce que l’on envisage pour ce système qui se veut adaptable à d’autres compétitions, à d’autres modes de jeu voire à d'autres disciplines.

 

                  

 

                                                                      3ème Brahim Djoubri

 

Point n°2 : On l’a vu rarement : il arrive que les deux joueurs subissent une pénalité au même moment. Beaucoup de spectateurs ont dit regretter cette période de « calme plat ». Une proposition méritera sans doute d’être étudiée par la CEB, celle de Sylvain Soumagne, père du Champion, qui propose dans un commentaire bien senti que le penalty de l’un prenne fin au moment où débute celui de l’autre. Dans ce cas : plus de temps mort et un spectacle assuré car la pression changerait de camp instantanément en cas d’erreur. A contrario, il faut quand même que l'erreur soit sanctionnée...

 

Quant à la durée des penaltys, elle a aussi fait débat. Certains la trouvent insuffisante, d’autres la jugent trop longue. Elle a été expérimentée par la CEB avant d’être définie à 90 secondes pour le 47/2 et à 60 secondes pour la Bande. Rien n’est gravé dans le marbre et d’autres tests seront probablement nécessaires pour affiner ce point de règlement essentiel. Toujours est-il que l’on a tous pu constater que 90 secondes « d’arrêt au stand » sont suffisants pour exercer une grosse pression sur les épaules des joueurs et permettre à l’adversaire de creuser ou réduire l’écart.

 

                  

 

                                                           3ème ex-aequo Patrick Niessen

 

Point n°3 : Le point d’entrée est indispensable après un raté pour ceux qui penseraient que l’on puisse revenir à la table sur la position laissée (par soi-même). Si les billes s’éloignent inexorablement et qu’il faut plusieurs points de rattrapage pour retrouver les billes sous contrôle, alors les joueurs pourraient être tenté de rater intentionnellement afin de se laisser une position idéale pour revenir à la table à l’issue du penalty. Depuis toujours, le point d’entrée est un élément clé des jeux de séries. L’expression « jouer la partie sur mouches », synonyme de perfection dans les disciplines classiques n’a jamais lassé quiconque…

 

                  

 

                                                                      5ème Marek Faus

 

Point n°4 : Incontestablement, la stratégie défensive n’a plus lieu avec ce format. Mais peut-on pour autant considérer qu’il n’y a plus d’interaction entre les joueurs ? Alors qu’un joueur passif sur sa chaise n’a aucune influence sur le jeu dans un match traditionnel, c’est loin d’être le cas lorsqu’il est en action sur le billard voisin. Le combat psychologique s’instaure dès les premières minutes. « Ne pas rater le premier » : c’est souvent l’objectif pour prendre la tête dans un match. Mais l’erreur ne met pas à l’abri d’une remontada de son adversaire. On a assisté à ce scénario dès le premier match entre Louis Edelin et Willy Gérimont.

 

A voir sur Youtube, le clip vidéeo des coulisses de la compétition

 

On a beau dire qu’il faut faire abstraction de la performance de l’adversaire, cela ne dure qu’un temps. Tous les joueurs pénalisés ont tourné la tête vers le billard de l’adversaire. La formule recèle bien des subtilités… Ce que l’on peut affirmer, c’est que le spectacle et la tension sont au rendez-vous et appréciés de tous. Les joueurs mouillent leur maillot. Jamais je n’avais observé tant de sueur sur les fronts en fin de match. L’effort est constant et intense durant 60 minutes. Nul doute que la condition physique joue un plus grand rôle avec cette formule. C’est l’essence même d’une Race… Le public novice comprend l’enjeu sans pour autant maitriser les règles du cadre 47/2, atout crucial pour attirer les néophytes !

 

                  

 

                                                                   6ème Pascal Dessaint

 

La balle est désormais dans le camp de la CEB qui peut s’enorgueillir d’avoir sorti de sa torpeur une communauté de passionnés qui se sont régalés devant leurs écrans. Les attentes sont grandes et on sent déjà pointer le duel entre les progressistes et les conservateurs. Quoiqu’il en soit, le prize-money sera l’une des clés de la présence des meilleurs, logiquement tentés par une carrière au 3 Bandes.

 

                  

 

                                                                  7ème Magali Declunder

 

                  

 

                                                                     8ème Louis Edelin

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