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Les ligues européennes par équipe : bon ou mauvais ?

09/02/2016

Publié par jérémie picart

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© Kozoom

Les championnats par équipe français, belge, néerlandais et allemand ont profité au 3 Bandes autant que le circuit des World Cups lors de ces trente dernières années. Caudron a fait 50 points en 9 reprises trois fois en compétition par équipe. Merckx a joué son record de 50 en 6 en Bundesliga. Blomdahl a été le premier à dépasser les 2,000 de moyenne à l’année (2,017 en 1998). Notre histoire serait décapitée ou incomplète sans ces championnats par équipe.

Mais n’y a-t-il que du positif ? Est-il souhaitable de continuer ainsi sous prétexte que ça fonctionne bien ? Personnellement, j’en doute. Le caractère individuel est inhérent au 3 Bandes, le collectif est fabriqué et il y a un aspect négatif à jouer en équipe.

Le fond de commerce du joueur de 3 Bandes obéit à la loi de l’offre et la demande. Lors l’économie se porte bien (années 90), les bons joueurs s’enhardissent et les salaires augmentent. Les joueurs un peu moins bons peuvent aussi tirer leur épingle du jeu car si la Maserati est prise, ils peuvent quand même récupérer l’Alfa Romeo. En période de récession (depuis 2007), les meilleurs mondiaux doivent faire des compromis et les suivants ne gagnent plus rien.

Pour les joueurs européens qui vivent du billard,  il y a presque une nécessité à jouer dans plusieurs pays à la fois. Et ils le font : Les pros sont actifs en Belgique, aux Pays-Bas, en Allemagne, France, Espagne, Portugal ou Autriche. Ca peut sembler glamour mais c’est en réalité un moyen peu rassurant et plutôt stressant de vivre avec de nombreux voyages fatigants. Si vous n’avez pas un travail d’appoint et que vous ne souhaitez pas donner de cours de billard, c’est la seule façon aujourd’hui d’être un joueur de 3 Bandes professionnel.

Maintenant, oublions quelques instants les joueurs dont le niveau se situe au-dessus de 1,500 (qui s’en sortent) et regardons du côté des nouveaux talents et des joueurs de second rang. A 1,200 à l’année, ils ne peuvent vivre de leur passion en jouant à l’étranger car ils ne sont pas encore assez forts. Et par conséquent, ils n’ont pas la possibilité de se frotter aux meilleurs mondiaux. S’ils veulent s’améliorer et acquérir de l’expérience en World Cup, ils devront se financer eux-mêmes : inscription, hôtels, voyage, dépenses. La plupart du temps, ils gagneront quelques matchs contre des « touristes » puis se feront éjecter par des Pros qui les battront 40 à 23 en 18 reprises. Percevront-ils une prime pour ce parcours ? Oubliez. Peu de joueurs peuvent se permettre de s’absenter une semaine d’un job régulier et d’investir, selon la destination, entre 1200 et 2000 euros pour 18 reprises d’expérience.

Ils adoreraient gravir les échelons mais il y a peu de différence entre la 15ème et la 150ème place mondiale. Pour s’installer dans le Top 12, par contre, la tâche est herculéenne. Vous pouvez essayer pendant dix ans sans jamais y parvenir même si votre niveau est excellent. Demandez à Eddy Leppens par exemple. Et même si vous y accéder, un rien peut vous mettre en danger et vous en sortir même si vous êtes l’un des trois meilleurs joueurs au monde. Demandez à Frédéric Caudron.

Cette population de joueurs devra avoir des nerfs solides car ils vont se heurter à un mur.

Pourquoi nos meilleurs représentants européens sont si vieux me direz-vous ? Pour reformuler la question, pourquoi la tranche de joueurs comprise entre 27 et 34 ans se bagarre avec les 48 ans de Caudron, les 50 de Jaspers ou les 53 de Zanetti et Blomdahl ? Sont-ils vraiment trop forts ? Oui, ils le sont. Tout simplement car ils ont vécu comme des Pros depuis près d’un quart de siècle et c’est ce que la génération émergente ne pourra pas faire.

Le Top européen a connu cela. Ils ont joué sur des Platin en Turquie, sur des Min en Corée, sur des Verhoeven et des Gabriels en Europe. Ils ont adapté leur jeu aux conditions rencontrées. Ils ont tous expérimenté des défaites 6 à 40 quand leurs adversaires ne leur ont laissé que 11 reprises à jouer sans position ouverte. Ils savent comment s’adapter, s’ajuster, résister à la pression d’un match ou d’un tournoi et s’imposer au final. Ce sont des polytechniciens du billard. La génération post Jaspers/Blomdahl aurait bien voulu entrer dans cette école mais ils ne pouvaient tout bêtement pas en assumer les frais de scolarité.

Les jeunes pousses de 2016 n’ont aucune chance réaliste de rattraper l’élite en place. Même s’ils ont du talent, ils ne possèdent pas les outils, le temps ou l’argent. Et par conséquent, ça ne les incite pas à entreprendre cette démarche. Notre monde du billard n’a qu’une poignée de Rois mais il manque de Princes.

L’accent porté aux ligues par équipe, par opposition aux tournois individuels, est un des contrastes entre l’Asie et l’Europe. Nous devrions sérieusement le prendre en considération et nous demander si nous faisons bien les choses ou si nous sommes coincés dans nos traditions contre-productives. Je ne préconise pas de supprimer nos ligues, bien sûr que non. Mais je conseille vivement que ce ne soit plus un fardeau pour les calendriers internationaux.

Les Asiatiques n’ont pas de compétitions par équipe, le 3 Bandes étant considéré comme un sport individuel. Ils ont par contre une foule de tournois individuels où ils peuvent gagner de l’argent. Au Vietnam, une vingtaine de joueurs arpentent les salles de billard avec 50 dollars en poche ; Deux jours plus tard, un seul ressort de cette salle avec 1.000 dollars dans son escarcelle. Nous pourrions peut-être, en Europe, s’inspirer un peu de cet esprit.

(Traduit de l'article de Bert van Manen en langue anglaise)

                                    

                                      La meilleure équipe en Europe, celle du Bergisch Gladbach en Bundesliga

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